Based in Paris, FRANCE, WOMBAT is a blog by CHRISTINA MACKENZIE. Her posts PORTRAY WOMEN THE WORLD OVER WHO'VE CHOSEN TO SERVE THEIR RESPECTIVE COUNTRIES IN THE DEFENCE SECTOR.

Premier maître Hélène

Premier maître Hélène

Premier maître Hélène. Crédit photo : Marine nationale

Premier maître Hélène. Crédit photo : Marine nationale

C'est le pins de deux dauphins porté par quelques collègues à bord de son premier navire qui alerta Hélène sur l'existence d'un métier dont elle n'avait jamais entendu parler : plongeur naval. Quelques années plus tard elle entrera dans l'histoire de la Marine en étant la première femme à réussir le stage éreintant de plongeur-démineur. Aujourd'hui, elles sont trois à pratiquer ce métier dans la force navale. 

Mais, contrairement à ce qu'on pourrait s'imaginer, cette femme un peu réservée qui parle doucement, mère de trois enfants, ne ressemble en rien à Rambo. Elle pesait 64 kg pour 1m72 quand elle débuta sa formation (elle n'en pèse plus que 58 « avec des jambes bien plus musclées grâce à la course à pied et plus de muscles dans le dos et les bras car je dois porter des charges lourdes », rit-elle). Et en fait, jeune, admet-elle « j'étais très mauvaise nageuse ! »

Le travail de son père, plombier au ministère de la défense à Paris, était son seul lien avec les forces armées. Sa mère polonaise était traductrice et les vacances en famille avec ses quatre petites sœurs sur l'Ile de Ré constituaient son unique rendez-vous annuel avec la mer. « Je me débrouillais pas mal à l'école mais je voulais faire quelque chose de mes mains plutôt que d'être coincée derrière un bureau », explique-t-elle.

“Je ne savais pas du tout que [la Marine] recrute à tous les niveaux et pour autant de métiers différents” 

Consciente que son bac littéraire la menait justement vers un bureau, et voulant trouver une alternative, elle chercha des idées dans une brochure : « Que faire avec ou sans le bac ». Elle y trouva mention de la Marine nationale. « Comme beaucoup de monde, je pensais que la Marine était réservée aux matheux et scientifiques prêts à bosser dans des prépas pour passer le concours de l'Ecole navale. Je ne savais pas du tout qu'elle recrute à tous les niveaux et pour autant de métiers différents », raconte-t-elle. « Et puis », sourit-elle, « je trouvais que l'uniforme était chouette, j'aimais le côté carré, la discipline, le fait de voyager sur des bateaux ». Elle rigole en se remémorant qu'elle avait dit à sa mère en forme de plaisanterie « que j'avais décidé d'être marin ». Mais ce qui avait commencé comme une blague prit forme ensuite « car plus je m'intéressais au sujet plus cela me plaisait ».

Elle déposa sa candidature à la Marine en 2000, l'année du bac. « Avec mon bac L j'étais exclue de toutes les spécialités à dominance scientifique. Alors parmi les métiers qui restaient j'ai choisit la transmission-communication. » Son dossier ne passa pas cette année là, mais elle persista et fut prise l'année suivante.

Une fois sa formation terminée elle fut affecté sur le Georges Leygues, une frégate anti-sous-marin « et c'est à bord de ce navire que j'ai vu le pins dauphins porté par quelques collègues. Comme nous n'étions qu'environ 180 à bord j'ai pu les observer au travail. » Elle a passé un an à les regarder travailler « et puis avec une autre fille et un gars du bateau nous avons décidé que nous aussi on voulait ce pins alors nous avons acheté de quoi faire de la plongée avec masque et tuba dans un magasin de sport et nous nous sommes entraînés quotidiennement après notre travail pendant un an. » Pour elle, c'est grâce à cet entraînement personnel qu'elle a réussi le stage de cinq semaines qui forme les plongeurs des forces armées à Saint Mandrier sur la côte Méditerranéenne. Elle y était la seule femme. « C'est parmi les stages les plus interessants de la marine », souligne-t-elle « mais il a la réputation d'être assez sélectif ce qui peut décourager les filles de s'y inscrire. »  Déterminée à réussir, elle a été admise au stage lors de son troisième essai. Hélène décrit ce stage comme étant « très dense physiquement »  avec beaucoup de courses à pied « et où on attend que les candidats se prouvent ».

Sur les 30 stagiaires du départ il n'y en avait plus que 20 à la fin, « soit parce qu'ils avaient raté une épreuve ou qu'ils se sont rendu compte que finalement ce métier n'était pas pour eux ».

Arborant fièrement son pins dauphins sur l'uniforme, Hélène se retrouva de nouveau en mer où, comme tous les autres plongeurs, elle continuait son métier initial de transmetteur en parallèle de celui de plongeur. « J'ai bien aimé ce stage et je voulais que la plongée soit vraiment mon métier. Mon travail de transmetteur allait se terminer et je ne voulais pas me retrouver dans un bureau », sourit-elle. Elle s'est donné six mois de réflexion avant de déposer son dossier pour faire le stage de plongeur-démineur « où, d'ordinaire, ils ne prennent que les meilleurs des cours de plongée de la marine », explique-t-elle... avec tellement de modestie qu'elle donne  l'impression de parler de quelqu'un d'autre ! La seule femme du stage, elle partageait une chambre avec d'autres qui travaillaient à l'école de plongée. « Mais j'utilisais le vestiaire des garçons parce qu'il n'y avait jamais le temps d'aller ailleurs comme il fallait se changer très rapidement », dit-elle avec un haussement d'épaules.

Hélène s’entraînant avec une fausse bombe en 2012. Crédit photo : Marine nationale

Hélène s’entraînant avec une fausse bombe en 2012. Crédit photo : Marine nationale

Hélène raconte qu'un plongeur de la marine descend jusqu'à 35m sous l’eau tandis qu'un démineur plonge deux fois plus profond, à 80m. « Les maths sont très appliqués et parfaitement assimilables par n'importe qui » dit-elle en minimisant les difficultés de calcul de volume, de densité, de masse devant un engin explosif que l'on doit démanteler à cette profondeur. « Le travail de démineur est très différent sous l'eau que sur terre », explique-t-elle. « Au lieu de nous alourdir avec des vêtements de protection, par exemple, nous nous débarrassons de tout ce que nous pouvons pour ne pas créer de champ magnétique qui pourrait détonner l'engin. » Le scaphandre autonome qu'ils utilisent est en plastique et en inox afin que la signature magnétique soit nulle.

Pour chacun de ses trois enfants elle s'est arrêté de plonger aussitôt la grossesse confirmée. « C'est la règle car personne ne veut tester l'effet d'une plongée en profondeur sur un embryon » dit-elle.

Aujourd'hui, quand ses enfants (âgés de 18 mois à 9 ans) lui en donnent le temps, elle aime bricoler chez elle ou s'installer derrière sa machine à coudre pour leur créer des vêtements. « J'aime aussi chanter dans la chorale et animer des messes » raconte-t-elle. Mais elle concède que « la marine ne vous fait pas de cadeau quand on choisit un boulot d'homme » et qu'il est parfois difficile de réconcilier ses ambitions professionnelles avec une vie personnelle. Et c'est pour cela que pour faire un métier comme le sien, elle conseille qu'il faut « s'accrocher, avoir une volonté à toute épreuve, surtout dans la durée. »



Lieutenant Laura

Lieutenant Laura

Aspirant Laure

Aspirant Laure